Rhum Martinique

Il est difficile de trouver un martiniquais qui ne pense pas que le meilleur rhum au monde vient de la Martinique. Il faut dire que l'obtention de l'AOC en 1996 est une exception mondiale. En effet, le rhum de Martinique possède quand même quelques particularités qui ne laissent pas indifférents les plus grands experts.

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Le rhum de Martinique : du blanc, du vieux, tous agricoles

L'histoire du rhum en Martinique remonte au 17ème siècle, l'industrie sucrière produisait alors de la mélasse qui, fermentée pouvait être distillée pour faire du rhum. A l'époque les alambics étaient de type charentais et étaient plutôt rudimentaires : une chaudière reliée à un serpentin placé dans un tonneau d'eau froide.

A cette époque, le rhum martiniquais était comme la majorité des rhums de la caraïbe, un sous-produit de la production de sucre, une eau-de-vie puissante et peu coûteuse. Le degré n'était pas vraiment controlé, il pouvait être vraiment fort et souffrait souvent d'une mauvaise réputation.

Son exportation vers la métropole est encadrée à partir de la fin du 17ème siècle puis, peu à peu assoupli jusqu'à la décision de Napoléon III en 1854 de supprimer totalement les droits de douane. La fin du 19ème voit exploser les exportations du rhum martiniquais vers la métropole. La Martinique devient le premier producteur mondial de rhum au début du 20ème siècle. Saint James s'exporte même à l'international.

Dans le même temps, de nombreuses innovations technologiques permettent d'augmenter la production du rhum en Martinique. En effet, les martiniquais adaptent et améliorent le matériel de distillation utilisé en métropole, ainsi les colonnes à distiller de type Savalle deviennent des colonnes créoles. Le chauffage évolue également puisqu'on privilégie peu à peu la machine à vapeur et l'utilisation de la bagasse (résidu du broyage de la canne à sucre que l'on utilise comme combustible). La Distillerie La Favorite est la dernière fumante à encore  fonctionner à la vapeur et à la bagasse aujourd'hui.

Même si le marché du rhum se maintient, il n'en est pas de même pour le sucre, en effet, fortement concurrencé par le sucre de betterave métropolitain, le sucre de canne voit ses commandes s'effondrer dans les années 1880 provoquant la fermeture de beaucoup de sucreries et donc de distilleries.

En Martinique, beaucoup de sucreries opèrent un virage stratégique vers le rhum directement à partir du jus de la canne. On parle de pur jus de canne, aux Antilles on parle de rhum agricole. La Martinique va s'engouffrer dans cette nouvelle manière de faire du rhum au point de complètement délaisser le sucre. Aujourd'hui, ne subsiste qu'une seule sucrerie en Martinique, les rhums du Galion.

Quelle est la différence entre un rhum agricole et un rhum industriel ?

Le rhum martiniquais jusqu'au 19ème siècle est donc un rhum de mélasse, on dite également rhum industriel. Le rhum est distillé à partir de la mélasse issue de la fabrication du sucre de canne.

Le rhum agricole aux Antilles ou "pur jus de canne" dans le reste du monde est fabriqué à partir du vesou, du jus directement extrait du broyage de la canne à sucre. La canne à sucre est broyée dans des moulins, le jus est récupéré, fermenté puis distillé dans des colonnes créoles.

Peut-on parler du meilleur rhum de monde ?

Bien sûr, un martiniquais vous dira que oui, mais le guadeloupéen vous dira que c'est le rhum de Guadeloupe. Nous savons bien que le rhum est une affaire de goût. Les martiniquais ont une place un peu particulière tout simplement parce qu'ils ont rapidement abandonné le sucre au profit du rhum, ont développé la production en adaptant les colonnes à distiller françaises, ont choisi le rhum agricole, une spécificité française et obtenu l'AOC en 1996. On peut quand même dire que la résonance et la reconnaissance du rhum martiniquais dépasse de très loin les frontières de la France.

Les différents rhums martiniquais, une histoire d'habitation

Les rhums de Martinique sont presque tous des rhums agricoles, à l'exception du rhum du Galion, dernière industrie sucrière en activité sur l'île. Ils sont également labellisé AOC pour une grande partie, qu'il soit produit par les marques qui le commercialise, ou sélectionnés par un embouteilleur auprès d'un rhumier respectant les directives de l'AOC.

De nouvelles distilleries se créent ou sont remises en activité depuis les années 2000. On constate qu'ils ont plutôt tendance à se détacher des contraintes de l'AOC en distillant à l'alambic à colonne comme les rhums A1710 ou les rhums HBS.

Quels sont les rhums de la Martinique ?

Si vous visitez la Martinique, vous aurez certainement envie de visiter quelques distilleries ! Il existe encore 9 distilleries en activité, on dit aussi "fumante" pour une distillerie qui produit du rhum. Les fumantes historiques sont : Depaz, JM, La Favorite, La Mauny, Neisson, 3 rivières et Saint James.

L'usine du Simon est également une distillerie en activité mais ne se visite pas, elle produit le rhum agricole pour plusieurs marques. D'autres anciennes distilleries comme les Rhums Clément ou HSE ne distillent plus mais sont spécialisés dans le vieillissement, la sélection et l'assemblage des plus beaux rhums de Martinique.

Enfin, des marques martiniquaises ne distillent pas mais font le travail de sélection, d'embouteillage et de vieillissement pour proposer des rhums AOC d'une qualité exceptionnelle comme Les rhums Hardy ou les rhums Madkaud. Parfois ils sont propriétaires de leurs propres cannes à sucre comme la Baie des Trésors.

Un rhum AOC, c'est quoi ?

Le cahier des charges de l'Appellation d'Origine Contrôlée "Rhum de la Martinique" est extrêmement précis et rigoureux, il permet la conservation d'une qualité de produit exceptionnel. La canne est récoltée à maturité entre le 1er janvier et le 31 août pendant la "campagne".

Le rhum blanc agricole ainsi obtenu sort de colonne entre 65 degrés et 75 degrés, il peut ensuite être mis en vieillissement plusieurs années pour devenir du rhum ambré, du rhum vieux ou du rhum hors d'âge.

Le rhum AOC blanc repose au moins 6 semaines en cuve inox, certaines distilleries de Martinique vont patienter plusieurs mois voire plus d'un an pour brasser lentement et faire réduire le rhum blanc avec une grande douceur ce qui lui apporte des arômes particuliers.

Le rhum ambré repose sous bois pendant entre 12 et 24 mois, en fût ou en foudre de chêne (très grand récipient en bois équivalent à plusieurs tonneaux). Le rhum vieux repose lui, en fût de chêne de moins de 650 litres, pendant au moins 3 ans, 4 ans pour un VSOP et 6 ans pour un XO.

Pour être reconnu rhum AOC, les rhums passent systématiquement par une dégustation du jury AOC. Les membres du jury AOC, tous formés et certifiés par le comité AOC de Martinique, vérifient que les rhums présentés respectent toutes les caractéristiques organoleptiques typiques des rhums AOC Martinique. Les rhums agricoles de Martinique sont les seuls a être dégustés pour être authentifiés, c'est une exception martiniquaise même au sein de la certification AOC.